vendredi 11 mai 2018

ON SE REVERRA de Lisa Jewell

Sortie le 18 avril 2018

Résumé: Les souvenirs, c’est comme les cadavres : tôt ou tard, ils refont surface. Qui est cet homme assis sur la plage en pleine tempête, sur le lieu d’un crime commis vingt ans plus tôt ? Il n’a pas de nom, pas de manteau, et a perdu la mémoire. Alice prend l’inconnu sous son aile et décide de l’héberger, sans savoir qu’il va bouleverser sa vie à jamais. Au même moment, dans la banlieue de Londres, Lily attend en vain le retour de l’homme qu’elle vient d’épouser et dont la police tarde à signaler la disparition. Parviendra-t-elle à retrouver celui pour qui elle a tout abandonné ?

Mon avis: Rien de tels que de varier les plaisirs pour apprécier ses nouvelles lectures. Aujourd'hui, je me tourne vers une sortie "suspens" de chez Milady.

Alors qu'elle sort ses chiens sur la plage, comme elle a l'habitude de le faire, Alice, cette maman célibataire de trois enfants, tombe sur cet homme qui n'a plus aucun souvenir. Alors qu'elle sait que cela pourrait lui poser problème à cause de son passé, Alice décide pourtant de prendre cet homme, qu'elle baptise Franck, sous son toit mais aussi de l'aider à découvrir qui il est. Mais comment pourrait-elle l'aider quand même l'homme semble avoir peur de découvrir qui il est et qu'il refuse de se rendre à la Police. A-t-elle hébergé un assassin?
Durant ce même temps, Lily, fraîche épouse de Carl, alerte la police de la disparition de son mari. Elle sent qu'il lui est arrivé quelque chose de terrible, mais la police ne semble pas la croire, d'autant plus que "Carl" n'existe pas. Qui est cet homme pour lequel, elle a tout abandonné?

Eh bien, en voilà une lecture qui m'aura permis de passer un très bon moment. Bien que je n'étais pas convaincue par le choix de la troisième personne de la part de l'auteur, je dois bien avouer qu'ici, il est parfaitement maîtrisé en me permettant d'avoir les points de vu des deux personnages féminins autour desquelles se construit patiemment le puzzle de l'histoire.
Accompagné d'un style fluide et agréable, ce choix permet aussi de créer l'ambiance adéquat à ce roman, à savoir un suspens bienvenu où tous les scenarii se mélangent autour du personnage mystérieux qu'est Franck.

D'ailleurs qui est Frank, cet homme paumé au beau milieu d'une plage sous une averse diluvienne, sans aucun souvenir, sinon que l'endroit où il se trouve lui semble familier? A travers les yeux d'Alice, c'est un homme bon, aux yeux des autres, il pourrait être un criminel. Malgré elle, Alice s'attache à cet homme et tente de percer ses mystères bien qu'il pourrait être marié, avoir des enfants qui l'attendent, ou qu'il pourrait avoir tué un homme comme il semble le croire.
J'ai vraiment apprécié le personnage d'Alice, cette mère célibataire qui se bat pour rattraper ses erreurs. L'empathie qu'elle dégage est tout simplement touchante et on ne peut que l'encourager à continuer sur cette voie.

Du côté de Franck, je ne sais pas si c'est dû à Alice qui voit du bon en lui, mais je me suis aussi attachée à lui. Tout dans ses actes crie qu'il est un "gentil", et pourtant ses souvenirs prouvent le contraire. Comment ne peut-on pas relier les flash back de cette famille en vacances en 1993 sur cette même plage qui entrecoupent le récit avec l'amnésie de Franck? Ou encore la disparition du mari de Lily qui a lieu au même moment que l'apparition de Franck? Chaque action m'a fait douter et m'a poussé à tourner les pages encore et encore.

Pour terminer cet avis, je soulignerais seulement l'excellent travail de Lisa Jewell qui a su insuffler la vie à son histoire autant grâce à ses personnages décris sans fioriture mais dont l'âme est mise à nue, qu'à l'atmosphère étouffante où le poids des décisions peut changer le destin de tous.

Mes extraits:
Alice lève les yeux de son écran et regarde par la fenêtre. Il est toujours là. L’homme sur la plage. Il n’a pas bougé depuis ce matin. Quand elle a ouvert ses rideaux à 7 heures, il était déjà assis sur le sable mouillé, les bras autour des genoux, les yeux rivés sur l’horizon. Elle garde un œil sur lui, prête à intervenir s’il essaie de se noyer. C’est déjà arrivé une fois. Un jeune homme pâle comme la mort avait laissé son manteau sur le sable pour disparaître dans le clair de lune bleuté. Trois ans après le drame, cette vision continue de hanter Alice. 
 Mais cet homme-là reste assis, immobile. Il fait froid, aujourd’hui, et les bourrasques giflent la plage d’embruns glacés. Pourtant, il est en tee-shirt, sans veste ni sac, sans chapeau ni écharpe. Alice a du mal à le cerner : pas assez débraillé pour être un rôdeur, pas assez bizarre pour être l’un des patients du centre psychiatrique de la ville. Il semble être en trop bonne santé pour être un junkie et il n’a pas bu une goutte d’alcool depuis qu’il est arrivé. Il regarde au loin, c’est tout. Alice cherche le mot juste pour le décrire. Il a l’air… paumé.

***
— Buvez ça, lui dit-elle. 
Il lui sourit et attrape le Thermos. 
— Je vous avais dit de vous mettre au chaud. 
— Oui, je m’en souviens. 
— Pourquoi est-ce que vous êtes encore là, alors ? 
— Je n’ai nulle part où aller. 
— Vous êtes à la rue ? 
Il acquiesce. Puis se ravise et fait « non » de la tête. 
— Je ne crois pas. Je n’en sais rien. 
— Comment ça, vous ne savez pas ? lui demande-t-elle, incrédule. Depuis combien de temps êtes-vous sur la plage ? 
— Depuis hier soir. 
— Et avant ? 
Il se retourne et la regarde droit dans les yeux. Il a peur. 
— Je ne sais pas où j’étais. 
Alice fait un pas en arrière. Ce n’était pas une bonne idée. « Ne t’en mêle pas. » La voix de Derry résonne dans sa tête. 
— Vraiment ? lui demande-t-elle. 
Il repousse les cheveux collés sur son front en soupirant. 
— Vraiment, dit-il en se versant un peu de thé dans le bouchon du Thermos. À la vôtre. Merci beaucoup. 
Alice regarde la mer. Elle ne sait pas quoi faire. Une partie d’elle voudrait rentrer à la maison, au chaud. Mais elle ne peut pas laisser cet homme sans en savoir plus. — Comment vous vous appelez ? 
— Je pense…, hésite-t-il, les yeux perdus dans la tasse de thé, que j’ai perdu la mémoire. Enfin… 
Il se retourne soudainement vers elle. 
— C’est possible, non ? ajoute-t-il. C’est la seule explication possible. Je ne sais pas comment je m’appelle, mais j’ai probablement un nom. Tout le monde a un nom, n’est-ce pas ?

Chronique de Sandy Twi-Cops
Broché: 411 pages
Éditeur: Milady
Collection: Suspens

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