QUAND LA NUIT DEVIENT JOUR de Sophie Jomain

Sorti le 27 Avril 2016

4ème de couverture : "On m’a demandé un jour de définir ma douleur. Je sais dire ce que je ressens lorsque je m’enfonce une épine dans le pied, décrire l’échauffement d’une brûlure, parler des nœuds dans mon estomac quand j’ai trop mangé, de l’élancement lancinant d’une carie, mais je suis incapable d’expliquer ce qui me ronge de l’intérieur et qui me fait mal au-delà de toute souffrance que je connais déjà.

La dépression.

Ma faiblesse.

Le combat que je mène contre moi-même est sans fin, et personne n’est en mesure de m’aider. Dieu, la science, la médecine, même l’amour des miens a échoué. Ils m’ont perdue. Sans doute depuis le début.

J’ai vingt-neuf ans, je m’appelle Camille, je suis franco-belge, et je vais mourir dans trois mois.

Le 6 avril 2016.

Par euthanasie volontaire assistée."

Mon avis : Il y a de ces auteurs qui savent aussi bien écrire du fantastique que du new adult, de la bit lit ou encore de la romance contemporaine, et Sophie Jomain en fait partie. C’est pourquoi la sortie de ses livres est toujours un moment de joie car je sais que quel que soit le thème, je vais passer un excellent moment de lecture.

Et Quand la nuit devient jour ne déroge pas à la règle. Sophie Jomain revient avec un roman, qui même s’il traite d’un sujet grave et tabou, reste tout simplement magnifique. Elle nous plonge en plein cœur de la dépression, cette maladie qu’on pense surfaite et qu'il nous est difficile à expliquer. On ressent et on vit les maux de Camille, même si on ne peut pas réellement se mettre à sa place. Pour preuve, j’avoue que comme ses parents, à certain moment j’ai eu envie de bousculer Camille pour qu’elle se bouge. J’ai été en colère contre elle car je ne trouvais pas de sens à sa dépression surtout à son âge. Quel gâchis qu’à 29 ans on ait envie de mourir mais d’un autre côté j’ai compris le cercle infernal dans lequel elle se trouvait et j’ai espéré très fort pour qu'au delà de ses maux et de sa souffrance sa nuit devienne jour.

Autre sujet abordé, celui de l’euthanasie volontaire assistée que j’avais découvert avec Will dans Avant toi de Jojo Moyès et qui m'avait déjà énormément touché. C’est un choix et une solution que je comprends et que j’accepte. Pourquoi ne pas respecter et accepter la nécessité pour une personne souffrant physiquement ou psychologiquement de pouvoir choisir le moment où il souhaite s’éteindre. Nous avons tous le droit de partir dans la dignité. Cette décision n'est sûrement pas prise à la légère car il ne doit pas être facile de décider quand mourir. Pour preuve, Camille y a mûrement réfléchi, elle a défendu son dossier devant le corps médical tout comme elle a été suivi psychologiquement jusqu'au jour fatidique. 

Présenté comme ça, vous pouvez vous dire que ce livre est trop sombre où trop dur, alors je ne vais pas vous mentir ... oui le thème de ce roman est grave, tabou et sensible mais Sophie l'aborde avec ce qu'il faut de légèreté, de sensibilité, d'humanité et d'émotion pour en faire un livre beau, intense et émouvant.  
Cette lecture m’a ému, bouleverser notamment avec la lettre de Camille, mais j’ai aussi souri et je me suis surprise à espérer car Sophie a cette faculté de nous toucher avec ses personnages, ses mots et ses émotions. Déjà rien que le titre Quand la nuit devient jour me bouleverse, il y a tant d'espoir et de sensibilité dans ces cinq mots. 

Nous faisons la connaissance de Camille Duclercq alors qu’elle n’est qu’une enfant. Elle a des parents aimants et à l’écoute. Mais tout cet amour n’est pas suffisant puisqu’il ne la protège pas des brimades de ses camarades de classe. Pour elle la scolarité est synonyme de harcèlement psychologique. Et puis comme nombre d’adolescente, elle découvre la haine de son corps qui va la pousser à des phases d’anorexie et de boulimie. A chaque chute, elle tente de se relever mais son mal être est plus profond que ça. Elle se renferme sur elle-même et se coupe du monde qui l’entoure puisque personne ne peut lui venir en aide. Elle souffre d’une maladie invisible incompréhensible aux yeux de beaucoup de monde mais qui elle, la tue chaque jour un peu plus. 

Et puis arrive le moment où à 29 ans, elle va prendre la décision d’arrêter de souffrir. Il est l’heure pour elle de partir dignement, et puis elle doit à ses parents qui subissent sa dépression depuis tant d’années.
Le 6 Avril 2016 marquera le jour où elle sera libre de toute souffrance.
Le 6 Avril 2016, elle sera euthanasiée …

Ses trois derniers mois, Camille va les passer dans un centre, ou le Dr Marc Peeters va la suivre et l’accompagner jusqu’au jour fatidique. La délivrance est proche.

Pour alléger quelque peu l’ambiance de ce livre, Sophie Jomain entoure Camille de personnes étonnantes, détonantes et attachantes.
Comme Brigitte qui travaille au centre et qui apparaîtra à chaque fois que Camille en aura besoin. Elle est posée, à l’écoute, gentille et serviable. Et combien même elle est curieuse, elle respectera les silences de Camille. Elle deviendra l’amie, la confidente la personne sur qui compter et apportera bonne humeur et légèreté.
Et puis il y a le Dr Peeters, cet homme de 35 ans, beau, gentil, drôle avec le sens de la répartie et qui n’a rien de commun avec les autres médecins. Il n’est pas là pour juger le choix de Camille, non, il va l’accompagner en lui apportant de la légèreté et un peu de soleil dans ses derniers jours de vie. Il sera pour elle un ami sincère et à l’écoute. Il apportera également joie et bonne humeur.
N’oublions pas la tante Marthe, qui m’a ému aux larmes dans la déclaration qu’elle fait à Camille.

En résumé, un roman bouleversant qui traite de la dépression et de l’euthanasie volontaire assistée. Oui c’est émouvant, oui c’est dur, oui c’est intense mais Sophie Jomain l’aborde avec fluidité, tendresse, respect et sensibilité.
Sophie, une fois encore je suis époustouflée par ta plume. Tu as douté et souffert en écrivant ce livre et il aurai été dommage qu'il n'aboutisse pas car le résultat est juste exceptionnel. Alors tout simplement merci.

**Un grand merci à Sarah et aux éditions Pygmalion pour cette lecture. Tout comme un grand merci à Sophie pour la dédicace et ce magnifique livre**

Mes extraits :

- Il ne s'agit pas de débattre, mais de faire entrer dans ton petit crâne que tu es en bonne santé et que rien n'est impossible si tu t'en donnes la peine ! Tu ne peux pas demander la mort pour ça Camille !

En l'espace d'une seconde, toutes mes bonnes résolutions partent en fumée et j'explose.

- Oserais-tu prétendre ressentir ce que je ressens ? Vivre ce que je vis ? Me battre comme je me bats et souffrir comme je souffre ? Il s'agit de ma vie, pas de la tienne ! Je t'interdis de me juger, car tu n'as aucune idée de tout ce par quoi je suis passée pour en arrivée là. Je vis un enfer depuis pour oublier à quel point chaque seconde de cette misérable existence est une lutte. Tu vois l'euthanasie comme une faiblesse ? Tu te trompes, ce sera ma délivrance !

******

Un étrange sourire se dessine alors au coin de ses lèvres.

- Vous ne vous attendiez pas à ça, n'est-ce pas ?

Je me racle la gorge.

- Eh bien, si je peux me permettre, Dr Peeters, je ne m'attendais pas à vous tout court.

Son éclat de rire est si inopiné que j'en reste interdite quelques secondes.

******

- Aimeriez-vous être heureuse, Camille ?

Je n'ai pas besoin de beaucoup réfléchir pour répondre à cette question.

- Je l'ai longtemps désiré. Plus maintenant.

- Pourquoi ?

Les mots fusent.

- Parce que le bonheur m'empêcherait de mourir.

De Coco Tessie-cops

Broché: 238 pages

Éditeur : PYGMALION

Collection : ROMANS