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vendredi 12 novembre 2021

LA MALEDICTION DE HIGHMOOR d'Erin A.Craig

 Sorti le 22 septembre 2021

Résumé: Au manoir de Highmoor, isolé au milieu d'un vaste océan, le Duc Thaumas, a déjà perdu quatre de ses filles dans de dramatiques circonstances : noyade, chute, maladie... L'une d'elles, Annaleigh, refuse de croire à la folle rumeur selon laquelle elles seraient toutes maudites. En se rendant sur le lieu du tragique accident de sa soeur Eulalie, Annaleigh découvre un passage caché dans la falaise. Une porte mystérieuse ouvre sur un royaume qui fait oublier tous leurs soucis aux jeunes duchesses. Noyées dans la joie et les fêtes, elles dansent chaque soir jusqu'à l'aube, épuisées, enivrées, envoutées... Seule Annaleigh réussit à s'arracher à ces bals hypnotiques, déterminée à comprendre la puissante malédiction de Highmoor, au risque comme ses soeurs d'y perdre la vie...

Mon avis: Lorsque j'ai lu le résumé de ce livre, je ne sais pas pourquoi mon cerveau est partie sur une histoire de sirènes... Des fois, il ne faut pas chercher à comprendre 😂 Donc non, ce roman ne parle pas de sirènes mais ce n'est pas pour autant qu'il n'en est pas moins intéressant. Au contraire.

Dès les premières pages, l'écriture envoûtante d'Erin Craig nous plonge dans la mystérieuse malédiction des filles Highmoor. Voilà quelques années déjà, depuis le décès de leur mère, que cette famille n'est pas sortie de son deuil, laissant la rumeur répandre qu'elles seraient maudites. Et voilà qu'Eulalie vient de mourir à son tour. Elle se serait jetée du haut d'une falaise. Chose impensable selon Annaleigh, sa soeur, mais aussi selon le prétendant d'Eulalie qui affirme qu'ils étaient sur le point de s'enfuir. Alors qu'elle décide d'enquêter, du côté de sa famille, sa nouvelle belle-mère a réussi à persuader leur père de ne pas faire de deuil et de laisser les filles faire leur entrée dans le monde. Entre l'enquête et les préparatifs, Annaleigh découvre la porte de Poséidon qui permettrait de passer d'un endroit à un autre d'une simple pensée. Les voilà toutes les cinq à participer à des bals toutes les nuits, jusqu'au jour où sa petite soeur lui rapporte voir leurs soeurs décédées... Délire ou malédiction? Serait-elle la prochaine?

Eh bien quelle histoire! Sincèrement, ce livre m'a tout simplement scotchée. Et pourtant, avec ce genre d'histoire, ce n'est pas facile d'y arriver mais l'autrice y est arriver et rien que pour ça, ça mérite le coup de coeur. Au coeur d'une époque révolue, Erin Craig a réussi à mêler croyance, fantastique et suspens avec brio. D'ailleurs, la seule chose qui empêche le gros coup de coeur, c'est la narration. Quel dommage d'avoir utilisé la troisième personne, surtout que tout est de l'unique point de vu d'Annaleigh. Je pense que la dimension intimiste que procure la première personne aurait pu augmenter la qualité du récit. Mais ça, ce n'est que mon avis personnel car sinon, ce livre est juste génial.
J'ai adoré l'ambiance sombre et pesante, parfois même effrayante quand on lit ce roman le soir. J'étais là-bas à 100%.

Du côté des personnages, j'ai beaucoup aimé le travail que l'autrice a fait. Chaque personnage était distinct et avait sa propre personnalité.
Annaleigh est bien évidement le personnage principal et on sent qu'elle a la tête sur les épaules. Elle est douce et maternelle avec ses soeurs, qui sont un peu plus frivoles mais pas moins intéressantes. 
Il y a aussi une romance avec l'énigmatique Cassius venu au chevet de son père. C'est une romance aussi douce que surprenante. Une romance qui colle parfaitement au roman.

En bref, un coup de coeur pour ce roman surprenant par bien des manières. Erin Craig a su combiner parfaitement différents genres pour en faire un roman unique en son genre et parfait pour une soirée d'Halloween.

Mes extraits:
La statue de Mère surplombait tout ce qui l’entourait, y compris les pierres tombales de mes sœurs. Celle d’Ava, d’abord, bordée de roses – sa fleur favorite. L’été, elles devenaient rosées et grasses, comme les bubons de la peste qui avaient emporté ma sœur alors qu’elle n’avait que dix-huit ans.
Octavia avait suivi un an plus tard. On avait découvert son corps au pied d’une grande échelle de bibliothèque, les membres enchevêtrés en un amas d’angles improbables. Un livre ouvert ornait son lieu de repos, accompagné d’une citation en vaipanien, que je n’avais jamais appris à déchiffrer.
Le poids de la tragédie écrasait déjà tellement notre famille que la mort d’Elizabeth nous avait semblé inévitable. On l’avait trouvée flottant dans la baignoire tel un morceau de bois mort à la surface de l’océan, imbibée d’eau et vidée de toute couleur. Des rumeurs avaient couru de Highmoor aux villages des îles voisines ; nées parmi les servantes, elles avaient été murmurées aux garçons d’écurie dans les arrière-cuisines, puis les poissonniers les avaient transmises à leur femme, qui les avaient diffusées, comme une menace, aux enfants polissons. Certains parlaient de suicide, mais plus nombreux étaient ceux qui pensaient que notre famille était maudite.
La statue d’Elizabeth représentait un oiseau. C’était censé être une colombe, mais elle était disproportionnée et ressemblait davantage à un goéland : un hommage adéquat, dans la mesure où le rêve le plus cher d’Elizabeth avait toujours été de s’envoler loin d’ici.
Que choisirait-on pour Eulalie ?
Autrefois, nous étions douze : les douze Thaumas. Mais aujourd’hui, la file que nous formions, mes sept sœurs et moi, était bien plus réduite, et je ne pouvais m’empêcher de penser qu’il y avait une once de vérité dans les sinistres élucubrations qui fleurissaient autour de nous. Avions-nous, d’une manière ou d’une autre, éveillé la colère des dieux ? Les ténèbres avaient-elles décidé de s’abattre sur notre famille ? Ou était-ce seulement une série de coïncidences aussi terribles que malencontreuses ?
Après la cérémonie, les invités grouillèrent autour de nous puis se dispersèrent. Alors qu’ils murmuraient des condoléances forcées, je remarquai qu’ils faisaient attention à ne pas s’approcher trop près de nous. Était-ce par égard envers notre rang, ou s’inquiétaient-ils que quelque chose déteigne sur eux ? J’aurais voulu mettre leur comportement sur le compte d’une superstition de bas étage, mais quand une tante éloignée vint vers moi, un fin sourire aux lèvres, je vis affleurer dans ses yeux, tremblante mais impossible à rater, la question que je me posais moi aussi :
Laquelle de nous serait la prochaine ?

Chronique de Sandy Twi-Cops

Broché: 576 pages
Editeur: Casterman


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